connaître

connaître

connaître [ kɔnɛtr ] v. tr. <conjug. : 57>
conoistre XIe; lat. cognoscere
Avoir présent à l'esprit (un objet réel ou vrai, concret ou abstrait; physique ou mental); être capable de former l'idée, le concept, l'image de. « On peut connaître tout, excepté soi-même » (Stendhal ). ICONNAÎTRE UNE CHOSE.
1 Se faire une idée de. Connaître un fait. Connaître un mot. 1. savoir. Connaître un lieu pour y être allé. Connaître les tenants et aboutissants d'une affaire. Chercher à connaître qqch. se documenter, s'informer, se renseigner, sonder. Faire connaître (une chose, une idée). apprendre. Faire connaître son sentiment, l'exprimer, le manifester. Je ne lui connais que des qualités, il n'a, selon moi, que des qualités.
Vx Connaître que. 1. savoir, voir. « je connus que le jeune homme avait beaucoup d'esprit » (Galland) .
2Avoir dans l'esprit en tant qu'objet de pensée analysé. Il connaît assez bien l'œuvre de Hugo. C'est une ville que je connais bien. Connaître qqch. à fond, par cœur. Loc. fam. Je ne connais que ça, se dit lorsqu'on n'arrive pas à se rappeler quelque chose que l'on sait (cf. Avoir un mot sur le bout de la langue).
Pouvoir faire usage de; être devenu habile en. Connaître une méthode, son métier. Connaître l'allemand. 1. savoir. Loc. Connaître la musique. On connaît la chanson. Connaître qqch. comme sa poche. Loc. fam. En connaître un rayon, un bout.
Vieilli Se connaître à (qqch.); mod. S'y connaître en : être très compétent (cf. S'y entendre). « un vieux singe qui s'y connaissait en grimace » (Maurois). Loc. ...ou je ne m'y connais pas, se dit pour appuyer une assertion dans un domaine où l'on s'estime compétent. — (Avec la négation) Ne pas connaître grand-chose à (un sujet). Il n'y connaît rien.
3Avoir vécu, ressentir. éprouver, expérimenter, ressentir. Je connais le problème. Connaître la faim, l'humiliation. Elle ne connaît pas la fatigue, la pitié ! Il ne connaît pas sa force, il n'en est pas conscient. Fam. La grippe ? connais pas ! Ne connaître que : tenir compte seulement de. Il ne connaît que son devoir, que la consigne. considérer, s'intéresser.
4 (Sujet chose) Avoir. Sa générosité ne connaît pas de bornes. La Bourse a connu plusieurs crises.
5Trans. ind. Connaître de : avoir compétence pour juger. Le tribunal de commerce ne connaît pas des causes civiles.
IICONNAÎTRE UNE PERSONNE.
1Être conscient de l'existence de (qqn). Je ne connais pas cet auteur, je n'en ai jamais entendu parler ( connu) . Je le connais de nom. Loc. Ne connaître qqn ni d'Ève ni d'Adam, ne pas le connaître du tout. Je lui connais plusieurs amis : je connais plusieurs personnes qui sont ses amis.
2Être capable de reconnaître; savoir l'identité de. Je connais cette tête-là. Je vous connaissais de vue avant qu'on ne nous présente. Iron. Je ne connais que lui !
3Avoir des relations sociales avec ( connaissance). Arriver à Paris sans connaître personne. Chercher à connaître une personne en vue. Pronom. Ils se sont connus en Italie. se rencontrer.
4(Style bibl.) Connaître une femme, avoir des relations charnelles avec elle. « Adam connut Ève, sa femme; elle conçut et enfanta Caïn » ( BIBLE ).
5Se faire une idée de la personnalité de (qqn). apprécier, comprendre, 1. juger. « vous ne me connaissez pas encore. Vous me faites grand tort de juger de moi par les autres » (Molière). Loc. fam. Je le connais comme si je l'avais fait.
Pronom. Se connaître : être capable de se juger. « Connais-toi toi-même » (trad. de Socrate). gnôthi seauton. Vx L'homme « se connaît misérable » (Pascal), sait qu'il est misérable.
Loc. Ne plus se connaître : ne plus se maîtriser (sous l'effet de l'exaltation ou de la colère).
6 Vx Reconnaître l'autorité de (qqn). Loc. Il ne connaît ni Dieu ni Diable.
III Vx Trouver en qqch., ou qqn (ce qu'on connaît déjà). reconnaître. C'est au fruit que l'on connaît l'arbre. « À l'œuvre on connaît l'artisan » (La Fontaine). ⊗ CONTR. Douter, ignorer, méconnaître, renier. Dédaigner, négliger.

connaître verbe transitif (latin cognoscere) Pouvoir identifier quelqu'un, quelque chose, les reconnaître ou avoir appris leur nom, ce qu'ils sont, qui ils sont : Je connais le garçon qui est là-bas. Il connaît bien les champignons. Avoir appris comment quelqu'un, un animal, un groupe vivent, se comportent et pouvoir prévoir leurs réactions, leurs sentiments, etc. : Apprendre à connaître les animaux. Entrer en contact avec quelqu'un, faire sa connaissance, l'avoir parmi ses relations : Quand et où avez-vous connu Jacques ? Être déjà allé dans un lieu, être au courant de sa disposition, de ses particularités et pouvoir y trouver son chemin : Vous connaissez Lyon ? Être au courant de quelque chose, de l'existence de quelqu'un, le savoir et pouvoir le dire : Connaître l'adresse d'un bon restaurant dans le quartier. Avoir appris une science, une technique, une langue, etc. ; savoir : Vous connaissez l'anglais ? Être au courant du fonctionnement d'un appareil, des éléments qui concourent à une situation, etc., en avoir l'expérience : Vous connaissez bien cette machine, montrez-moi comment elle marche. Comporter quelque chose, l'avoir ou en être affecté, atteint : Règle qui ne connaît aucune exception. Se trouver dans une certaine situation, éprouver, ressentir tel état : Avoir connu la faim, les privations. Savoir que quelqu'un est pourvu de quelque chose, qu'il le possède : Je ne vous connaissais pas cette qualité.connaître (citations) verbe transitif (latin cognoscere) André Frénaud Montceau-les-Mines 1907-Paris 1993 À force de s'aimer l'on ne se connaît plus. Il n'y a pas de paradis Gallimard Alphonse de Prât de Lamartine Mâcon 1790-Paris 1869 Notre crime est d'être homme et de vouloir connaître. Premières Méditations poétiques, l'Homme Louis XIV, roi de France Saint-Germain-en-Laye 1638-Versailles 1715 Et pour cet art de connaître les hommes […], je vous dirai, mon fils, qu'il se peut apprendre, mais qu'il ne se peut enseigner. Mémoires André Malraux Paris 1901-Créteil 1976 Connaître par l'intelligence, c'est la tentation vaine de se passer du temps. La Condition humaine Gallimard Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux Paris 1688-Paris 1763 Fiez-vous aux personnes jalouses du soin de vous connaître. La Vie de Marianne François Mauriac Bordeaux 1885-Paris 1970 Académie française, 1933 Nous ne connaissons bien que ce dont nous sommes dépouillés. Trois Grands Hommes devant Dieu Le Capitole Charles de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu château de La Brède, près de Bordeaux, 1689-Paris 1755 Je n'aime point Dieu parce que je ne le connais pas, ni le prochain parce que je le connais. Mes pensées Marie Rouget, dite Marie Noël Auxerre 1883-Auxerre 1967 Connais-moi si tu peux, ô passant, connais-moi ! Je suis ce que tu crois et suis tout le contraire. Les Chansons et les heures, Connais-moi Stock Charles Augustin Sainte-Beuve Boulogne-sur-Mer 1804-Paris 1869 Connaître à fond, et tel qu'il est, un être humain et l'aimer, c'est impossible. Correspondance, à Mlle Adèle Couriard, 17 mars 1859 Cicéron, en latin Marcus Tullius Cicero Arpinum 106-Formies 43 avant J.-C. Que chacun s'exerce dans l'art qu'il connaît. Quam quisque norit artem, in hac se exerceat. Tusculanes, I, 18 Commentaire Cicéron cite ce précepte comme un proverbe grec. Ovide, en latin Publius Ovidius Naso Sulmona, Abruzzes, 43 avant J.-C.-Tomes, aujourd'hui Constanţa, Roumanie, 17 ou 18 après J.-C. On ne désire pas ce qu'on ne connaît pas. Ignoti nulla cupido. L'Art d'aimer, III, 397 Virgile, en latin Publius Vergilius Maro Andes, aujourd'hui Pietole, près de Mantoue, 70 avant J.-C.-Brindes 19 avant J.-C. D'après un seul, connais-les tous. … ab uno Disce omnes. L'Énéide, II, 65 Thomas Browne Londres 1605-Norwich 1682 Nul homme ne peut justement en censurer ou en condamner un autre, car, à la vérité, nul homme n'en connaît vraiment un autre. No man can justly censure or condemn another, because indeed no man truly knows another. Religio Medici, II, 4 Confucius, en chinois Kongzi ou Kongfuzi [maître Kong] 551-479 avant J.-C. Le sage ne s'afflige pas de ce que les hommes ne le connaissent pas ; il s'afflige de ne pas connaître les hommes. Entretiens, I, 1 (traduction S. Couvreur) connaître (difficultés) verbe transitif (latin cognoscere) Conjugaison Avec accent circonflexe sur le i devant tconnaître (expressions) verbe transitif (latin cognoscere) Familier. Ça me connaît, je sais m'y prendre dans ce domaine. Familier. Connaître la chanson, la musique, savoir à l'avance ce qui va se passer, ce qui va être dit, parce que c'est toujours la même chose. Connaître une femme, un homme, avoir avec elle ou avec lui des relations sexuelles (familier et plaisant, ou style biblique). Connaître quelque chose à quelque chose, avoir quelques notions dans un domaine quelconque. Connaître quelqu'un de nom, de réputation, de vue, être au courant de son existence, en avoir entendu parler, l'avoir déjà rencontré, mais ne pas être en relation avec lui. Familier. En connaître un bout, un rayon, être très au courant de quelque chose, être calé dans une science, une technique, etc. Faire connaître, montrer, indiquer, dire, apprendre quelque chose à quelqu'un, l'en informer, porter à sa connaissance l'existence de quelqu'un, le lui faire rencontrer ; lui faire découvrir et, en particulier, apprécier quelque chose ou quelqu'un. Familier. Je ne connais que lui, je le connais très bien. Ne connaître que, ne prendre en considération que quelqu'un, quelque chose. Ne pas connaître son bonheur, se dit de quelqu'un qui se plaint alors qu'il est dans une situation privilégiée par rapport aux autres. Ne pas connaître sa force, ne pas pouvoir se dominer ou maîtriser sa force. Familier. Ne plus (vouloir) connaître quelqu'un, rompre toute relation avec lui. Se faire connaître, faire savoir qui l'on est et, en particulier, acquérir une réputation, se faire apprécier. ● connaître (synonymes) verbe transitif (latin cognoscere) Avoir appris comment quelqu'un, un animal, un groupe vivent, se...
Synonymes :
- apprécier
Contraires :
Être au courant de quelque chose, de l'existence de quelqu'un, le...
Synonymes :
- tenir de
Avoir appris une science, une technique, une langue, etc. ; savoir
Synonymes :
- posséder
Contraires :
Être au courant du fonctionnement d'un appareil, des éléments qui...
Synonymes :
Se trouver dans une certaine situation, éprouver, ressentir tel état
Synonymes :
- éprouver
- expérimenter
Connaître une femme, un homme
Synonymes :
- posséder
Ne connaître que
Synonymes :
- considérer
- penser à
- se préoccuper de
- s'occuper de
connaître verbe transitif indirect Connaître de quelque chose, prendre connaissance d'une question et la juger ; avoir le droit de statuer sur quelque chose. ● connaître (expressions) verbe transitif indirect Connaître de quelque chose, prendre connaissance d'une question et la juger ; avoir le droit de statuer sur quelque chose.

connaître
v. tr.
d1./d Avoir une idée pertinente de. Je connais les raisons de leur brouille.
d2./d être informé de. Connaissez-vous les dernières nouvelles?
d3./d Avoir la pratique de. Connaître une langue, une science, un métier.
d4./d Avoir l'expérience de. Connaître la misère.
d5./d Connaître un endroit, y être allé.
d6./d (Sujet nom de chose.) Avoir. Son ambition ne connaît pas de limites.
d7./d Ne connaître que (qqch): se préoccuper uniquement de. Ne connaître que son devoir.
d8./d Savoir l'identité de (qqn). Connaître qqn de vue.
d9./d Avoir des relations avec (qqn). Je le connais depuis trois ans.
|| v. Pron. Elles se sont connues au pensionnat.
d10./d Apprécier, comprendre le caractère, la personnalité de (qqn). J'ai mis longtemps à bien le connaître.
d11./d (Luxembourg) ADMIN Connaître (qqch) de qqn, apprendre cela de sa bouche. (V. savoir).
d12./d v. Pron. Avoir une juste notion de soi-même.
|| S'y connaître: être compétent.
d13./d v. tr. indir. DR Connaître de: avoir autorité pour statuer en matière de. Connaître d'une affaire.

⇒CONNAÎTRE, verbe trans.
I.— Vieilli ou littér. Connaître qqn ou qqc. Reconnaître.
A.— Reconnaître, discerner.
1. Reconnaître la marque de quelqu'un ou de quelque chose. Ils [les hommes] m'ont connue aux bleus stigmates Apparus sur ma pauvre peau (VALÉRY, Charmes, 1922, p. 133).
Au fig., expr. proverbiale. L'arbre se connaît à ses fruits. ,,Une doctrine se juge par ses conséquences`` (Ac. 1932).
P. ext. Je ne l'ai vu qu'une fois, je le connaîtrais entre mille; je le connais à sa voix. Tartarin, en le [le chameau] voyant, change de couleur et feint de ne pas le connaître (A. DAUDET, Tartarin de Tarascon, 1872, p. 131) :
1. C'était au point que lorsqu'elle [la lingère] rencontrait Baugé dans les galeries, elle affectait de ne pas le connaître.
ZOLA, Au Bonheur des dames, 1883, p. 703.
2. Distinguer, faire la différence entre. Il [l'homme] serait également un Dieu, le serpent l'a bien dit, s'il pouvait connaître le bien et le mal (RUYER, Esquisse d'une philos. de la struct., 1930, p. 347).
Au fig. et fam. Connaître sa main droite de sa main gauche. Être capable de discernement.
B.— Accepter, admettre quelqu'un ou quelque chose comme ayant de l'autorité.
1. Connaître qqn. Je ne connais de maître que vous; je ne connais ici de maître que moi (Ac. 1835-1932); il ne connaît ni Dieu ni diable (fam.). Le duc, (...) (À fra Leonardo). Eh bien, moine, puisque tu ne connais ni duc ni maître, place au plus fort! (A. DUMAS Père, Lorenzino, 1842, III, 5, p. 256).
2. Connaître qqc., dans le domaine du dr. En Angleterre on ne connaît point la loi salique (Ac. 1835-1932). Les populations de la Grèce et de l'Italie, dès l'Antiquité la plus haute, ont toujours connu et pratiqué la propriété privée (FUSTEL DE COULANGES, La Cité antique, 1864, p. 68).
II.— Connaître qqc. Avoir présente à l'esprit l'idée plus ou moins précise ou complète d'un objet abstrait ou concret, existant ou non.
A.— PHILOS. et dans un contexte philos. gén. [L'obj. désigne tout objet possible de connaissance] La faculté de connaître étant supposée coextensive à la totalité de l'expérience (BERGSON, L'Évolution créatrice, 1907, p. 192). Manque de fierté évident dans l'entêtement à vouloir connaître discursivement jusqu'au bout (G. BATAILLE, L'Expérience intérieure, 1943, p. 169).
Emploi abs. Le besoin, le désir, la soif de connaître; la difficulté de connaître; apprendre à connaître; connaître par les sens, l'intuition, l'intelligence.
Emploi subst. masc. avec valeur de neutre. Le connaître. Acte de connaître. Les limites du connaître (cf. connaissance, action, l'agir, l'être) :
2. La conscience est à nos yeux le moment le plus haut de la réalité et par là le connaître est au cœur de l'être.
O. HAMELIN, Essai sur les éléments principaux de la représentation, 1907, p. 358.
B.— Être informé de et/ou sur l'existence ou la nature de quelque chose. Connaître un fait, une nouvelle; connaître la fonction, la nature, la valeur de qqc.; connaître les caractères, les propriétés d'un objet. Parvenue près d'un vieux châtaignier qu'elle connaissait, elle fit une dernière halte (HUGO, Les Misérables, t. 1, 1862, p. 471). Il [ce marchand] les prévenait [les amateurs] (...) dès qu'il connaissait un objet à vendre pouvant leur convenir (MAUPASSANT, Contes et nouvelles, t. 1, La Baronne, 1887, p. 1300). L'homme connaît le monde non point par ce qu'il y dérobe mais par ce qu'il y ajoute : lui-même (CLAUDEL, Art poétique, Connaissance du temps, 1907, p. 133) :
3. Nous connaissons mal encore l'effet des substances chimiques contenues dans les aliments sur les activités physiologiques et mentales.
CARREL, L'Homme cet inconnu, 1935, p. 369.
SYNT. Connaître tous les détails d'une histoire, les secrets d'une organisation, l'objet d'une visite, les résultats d'une enquête, d'une recherche; connaître un restaurant; connaître les sentiments de qqn à son égard; être censé connaître qqc. PARAD. Avoir, prendre connaissance de qqc.; être renseigné sur, avoir communication de qqc., apprendre qqc.; être, se mettre au courant de qqc.
Locutions
1. Vx. ou littér. Connaître qqc., connaître que + ind. Trop pauvre d'argent pour mourir dans l'ivresse, En m'éveillant à jeun, je connus ma détresse (DELAVIGNE, Les Enfants d'Édouard, 1833, II, 3, p. 58) :
4. ... — Mon père est Abdoullah-Khan, et sans doute vous connaissez qu'il est le lieutenant favori et le ministre tout-puissant de Son Altesse, que Dieu conserve!
GOBINEAU, Nouvelles asiatiques, Les Amants de Kandahar, 1876, p. 267.
P. ext. Se rendre compte (de); avoir la révélation que. Synon. emphatique de savoir. Il [François] connut qu'elle [Jeannette] avait pleuré, et il en fut tracassé dans son esprit (G. SAND, François le Champi, 1850, p. 115) :
5. ... une folle bourrasque éclata, un soir, pendant le changement de marée. Les pêcheurs connurent qu'ils allaient écoper.
QUEFFÉLEC, Un Recteur de l'île de Sein, 1944, p. 108.
2. Connaissant + subst. Synon. étant donné, sachant. Je redoutais son jugement, connaissant l'intransigeance de la jeunesse (GIDE, Les Faux-monnayeurs, 1925, p. 1202). Construire un triangle ABC connaissant le côté (...), la hauteur (...) et l'angle (L. ROUX E. MIELLOU, Géom., Classes de seconde, 1946, p. 224).
3. Connaître qqc. à qqn; connaître une liaison à qqn. Savoir que quelqu'un a... :
6. Il [M. de Trailles] dépense toujours environ cent mille francs par an sans qu'on lui connaisse une seule propriété, ni un seul coupon de rente.
BALZAC, Gobseck, 1830, p. 406.
4. Faire connaître qqc. à qqn; faire connaître que + ind. Synon. diffuser, divulguer. Je viens vous faire connaître que j'accepte votre proposition. Je refusais de faire connaître aux familles intéressées l'état de ma fortune (MAURIAC, Le Nœud de vipères, 1932, p. 144) :
7. L'assemblée fit connaître avec éclat que, pour elle, le général de Gaulle représentait la France en guerre et que son gouvernement était celui de la République.
DE GAULLE, Mémoires de guerre, 1956, p. 158.
♦ Synon. de exprimer, signifier. Faire connaître ses intentions, ses projets.
♦ Synon. de présenter, lancer :
8. ... bulletins de maison, édités par certaines firmes importantes ou par des groupements de firmes pour faire connaître leurs produits ou leurs méthodes.
La Civilisation écrite, 1939, p. 1614.
C.— Savoir quelque chose le plus souvent dans un domaine particulier, moyennant l'étude systématique et/ ou la pratique, l'expérience.
1. [L'accent est mis sur le contenu du savoir] Connaître l'alphabet; connaître une langue, une discipline scientifique; connaître un (son) métier; connaître les plantes. Lorsque l'apprenti connaît suffisamment sa casse, cette étude est complétée par la lecture sur le plomb (E. LECLERC, Nouveau manuel complet de typogr., 1932, p. 74) :
9. Prud'hon connaissant à fond la pratique matérielle de son art, beaucoup trop négligée par les artistes de son temps, ébauchait en grisaille...
T. GAUTIER, Guide de l'amateur au Musée du Louvre, 1872, p. 20.
Spéc. Connaître ses auteurs, ses classiques. Synon. posséder. Il ne connaît pas son texte.
SYNT., LOC., EXPR. Connaître qqc. sur le bout des doigts, par cœur, à fond, sommairement; connaître qqc. sous toutes ses faces; bien connaître une situation. Fam. En connaître un bout, un rayon sur qqc.; connaître la partie; connaître son affaire; connaître la chanson, la musique (fig.); je ne parle pas de ce que je ne connais pas; on ne se mêle pas de ces choses quand on ne les connaît pas; je ne le connais que trop; je la connais celle-là... il ne faut pas me la faire; je la connais dans les coins; je la connais! je ne connais que cela; on connaît ça! laisse-moi faire, ça me connaît!
2. [L'accent est mis sur la compétence particulière qui accompagne ou conditionne le savoir] Être compétent, (sous-entendu en quelque chose). Se connaître à, en qqc.; s'y connaître. [Fam.] Tu t'y connais un peu, toi? Il n'y connaît rien; je n'y connais pas grand chose; il ou elle ne connaît rien à rien. [Clapart :] — (...) Oscar devenir régisseur de Presles? (...) mais il faut savoir l'arpentage, se connaître à la culture (BALZAC, Un Début dans la vie, 1842, p. 418). Il prétendait se connaître aux arts; mais il s'en tenait à certains noms consacrés (R. ROLLAND, Jean-Christophe, L'Adolescent, 1905, p. 239).
Pour renforcer un jugement dans un domaine où l'on s'estime compétent. Comtesse, c'est de la sympathie, ou je ne m'y connais pas (A. DUMAS Père, Un Mariage sous Louis XV, 1841, I, 8, p. 119) :
10. M. Feuillet les expédiait au ciel en deux ou trois ans au plus. Voilà un bon directeur spirituel, ou je ne m'y connais pas!
A. FRANCE, La Vie littéraire, t. 1, 1888, p. 27.
Spéc., DR., emploi intrans. [Le suj. désigne un juge et, p. ext., une assemblée délibérative] Connaître de qqc.; en connaître. Être compétent pour juger. Connaître des contestations, des infractions, des litiges (relatifs à); ce juge ou ce tribunal ne peut pas connaître de cette affaire; il en connaît en première instance, en appel :
11. Quelqu'un peut avoir à se plaindre d'un acte arbitraire de la police; qui recevra sa plainte? Quel ministère connoîtra du délit?
CHATEAUBRIAND, Polémique, 1818-27, p. 128.
12. Il est interdit aux tribunaux judiciaires de connaître en principe des différends où l'administration est impliquée.
G. VEDEL, Manuel élémentaire de dr. constitutionnel, 1949, p. 162.
P. ext., lang. littér. Être capable de connaître :
13. ... l'auteur [M. Sixte] de ces trois traités admet que l'esprit est impuissant à connaître des causes et des substances...
P. BOURGET, Le Disciple, 1889, p. 22.
D.— [Souvent avec une forte valeur affective] Savoir en vivant ou pour avoir vécu, éprouvé, ressenti ou senti quelque chose. Connaître la misère, la prison; connaître une vie difficile, un destin tragique; j'ai connu des temps meilleurs (fam.); j'ai connu cela avant vous (fam.) :
14. Il est certain qu'un véritable artiste connaît l'humilité devant les modèles des maîtres ou devant les formes que lui propose la nature.
BARRÈS, Mes cahiers, t. 10, 1913, p. 169.
15. Tu ne te lèves pas assez tôt. Tu n'auras pas connu ces départs avant l'aube, ni tout ce que le vent matinal verse de martial dans le cœur.
GIDE, Journal, 1938, p. 1300.
P. anal. [Le suj. désigne une œuvre ou une entreprise humaine] Qqc. connaît des difficultés, un renouveau, un retentissement, un grand succès; une entreprise connaît un grand développement. Depuis 1948, le cinéma soviétique connaît un nouvel et très remarquable essor (G. SADOUL, Hist. d'un art, 1949, p. 356). Cette société paysanne traditionnelle a connu son apogée démographique au cours du XIXe siècle (Traité de sociol., 1967, p. 319).
Loc. et expr.
♦ [Avec une idée d'appréciation] Avoir conscience de, p. ext., apprécier à sa vraie valeur. Connaître sa force, ses limites; tu ne connais pas ton bonheur, ta chance.
♦ [Avec une nuance parfois péj.] Avoir de l'expérience. Connaître la vie; je connais bien la vie; tu ne connais rien de la vie. Elle connaissait trop la vie la pauvre Antoinette. Elle avait trop vu le monde, la réalité (VAN DER MEERSCH, Invasion 14, 1935, p. 201).
P. ext. Synon. emphatique de avoir. Je n'ai jamais connu la grippe, le mal de dent.
E.— [Le plus souvent à la forme négative] Apprécier et tenir compte de quelque chose dans la pratique. Ne connaître que son devoir, la loi, son plaisir; ne connaître que l'argent; il ne connaît pas la pitié. Il [Poirier] est bon et généreux, mais il a des idées étroites et ne connaît que son droit (E. AUGIER, Le Gendre de Monsieur Poirier, 1854, p. 267). Il [le garde champêtre] s'entêta, en ancien militaire qui ne connaissait que sa consigne (ZOLA, La Terre, 1887, p. 326). Vous êtes un agrégé hellénisant et ne voulez connaître que l'Antiquité (BARRÈS, Le Voyage de Sparte, 1906, p. 56).
Expr. et loc. fam.
♦ [Avec une nuance d'appréciation méliorative] — Il résiste, châtiez-le, je ne connais que cela; je ne connais qu'une chose c'est d'agir franchement (Ac. 1835-1932).
P. ext., fam. Une bonne pluie pour calmer les esprits, je ne connais que ça; une bonne pipe après le repas je ne connais que ça (ou je ne connais rien de meilleur, de comparable, de semblable).
Péj. Être dominé par une passion, une colère au point de ne plus admettre aucune considération d'aucune sorte. Il ne connaît plus rien; il ne connaît plus de frein, plus de loi; son ambition, sa violence ne connaît plus de bornes. Ma jalousie ne connut plus de bornes (SARTRE, Les Mots, 1964, p. 73) :
16. Abandonné de Dieu qui punit en se retirant, il ne connoît plus de frein. D'autres cyniques étonnèrent la vertu, Voltaire étonne le vice.
J. DE MAISTRE, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, t. 1, 1821, p. 276.
III.— Connaître qqn.
A.— Être informé de et/ou sur l'existence de quelqu'un. Connaître qqn de nom, de vue. Un chantre à barbe noire que je connaissais pour l'avoir quelquefois aperçu dans la rue (GUÉHENNO, Journal d'une « Révolution », 1937, p. 94). Je connais un esthéticien qui fait des miracles (S. DE BEAUVOIR, Les Mandarins, 1954, p. 344) :
17. ... beaucoup de malfaiteurs occupent à Paris une sorte de position officielle. La police les connaît, elle a leur nom et leur adresse, elle tient registre de leur corruption; elle les suit pas à pas, pour parvenir à les prendre en flagrant délit.
L. BLANC, Organ. du travail, 1845, p. 26.
B.— Connaître quelqu'un pour l'avoir rencontré et éventuellement entretenir avec lui des relations d'ordre social (cf. présenter (qqn), rencontrer). « Demain, je vous ferai connoître l'homme le plus intéressant de ce canton, » ... (CRÈVECŒUR, Voyage dans la Haute Pensylvanie, t. 3, 1801, p. 38). Nous l'avons connu comme client avant de le connaître comme ami (MAUPASSANT, Pierre et Jean, 1888, p. 344) :
18. Elle me dit : « Oh! je sais que vos parents connaissent des gens très bien. Vous êtes ami de Robert Forestier et de Suzanne Delage. »
PROUST, Le Côté de Guermantes 2, 1921, p. 368.
Lang. de la politesse. Je suis content, enchanté, heureux, ravi de vous connaître.
SYNT. et EXPR. Je ne connais personne dans cette maison, ce pays; connaître un ministre; je l'ai connu au collège; je l'ai connu enfant; nous nous connaissons de longue date, depuis l'enfance; je connais du monde (beaucoup de monde, tout le monde) ici; je n'ai pas (encore) l'honneur de vous connaître; ne pas vouloir se faire connaître; d'où le connaissez-vous? Fam. Je ne le connais ni d'Ève ni d'Adam; il est connu comme le loup blanc. P. ell. Untel? Connais pas! Comment! Vous ne connaissez pas Untel?
Spécialement
Lang. culturelle. Ne plus connaître qqn. Synon. décider d'ignorer, de ne plus fréquenter qqn. J'estime qu'il s'est déshonoré, je ne le connais plus (Ac. 1932).
Littér., p. euphém., domaine des relations charnelles. [P. réf. à la lang. de la Bible] Connaître une femme, un homme. Avoir avec elle, avec lui des relations sexuelles. Je suis l'immaculée effrénée. Je suis la vestale bacchante. Aucun homme ne m'a connue (HUGO, L'Homme qui rit, t. 3, 1869, p. 96) :
19. ... elle [la Mouquette] se livra dans une maladresse et un évanouissement de vierge, comme si c'était la première fois, et qu'elle n'eut jamais connu d'homme.
ZOLA, Germinal, 1885, p. 1353.
C.— Connaître et éventuellement apprécier quelqu'un dans sa nature, dans sa personnalité. Celui qui vous connaît et vous apprécie ne veut plus rien des biens de la terre (LAUTRÉAMONT, Les Chants de Maldoror, 1869, p. 191) :
20. ... un garçon que j'avais connu si primesautier, si exubérant, si entier dans ses sympathies ou dans ses aversions.
G. LEROUX, Le Parfum de la dame en noir, 1908, p. 11.
SYNT. et EXPR. Je le connais pour ce qu'il est; je le connais incapable de mentir; je connais quel homme il est; je le connais intimement; cet homme (ne) gagne (pas) à être connu. Fam. Il a bien trompé son monde, on ne le connaissait pas ainsi (sous ce jour); vous me connaissez (bien, très) mal! c'est (ce serait) bien (mal) peu me connaître que de penser que je peux (pourrais) faire telle chose; tel que (comme) je te connais, te connaissant comme je te connais, tu vas faire telle chose; je commence à vous connaître! je le connais comme si je l'avais fait; je le connais mieux qu'il ne se connaît.
Connaître qqn dans sa manière d'être; connaître le caractère, les défauts, les goûts, les habitudes de qqn; je connais son point faible :
21. Nous connaissons votre loyalisme. Il vous fera un devoir de ne rien révéler des instructions que vous aurez reçues.
ROMAINS, Les Copains, 1913, p. 195.
En partic.
1. [Avec une idée de publicité] Connaître qqn; faire connaître qqn; se faire connaître par qqc., de qqn. Synon. être, faire, se faire apprécier, estimer, p. ext., devenir célèbre, acquérir une réputation; anton. méconnaître. La postérité ne connaît d'un acteur que la réputation que lui ont faite ses contemporains (E. DELACROIX, Journal, p. 172). Un petit recueil de morceaux choisis, en vue de me faire connaître des bibliophiles illettrés (BLOY, Journal, 1901, p. 59).
Péj. Faire connaître qqn (tel qu'il est). Synon. démasquer. Faire connaître le diffamateur, pièces en mains (J. MORIENVAL, Les Créateurs de la grande presse en France, 1934, p. 64).
2. [Avec une idée de connaissance approfondie, parfois péj.] Avoir une grande expérience, connaissance ou habitude de quelqu'un et, p. ext., des relations humaines. Tu ne connais pas les Brésiliens. C'est des crânes qui tiennent à s'empaler par le cœur! (BALZAC, La Cousine Bette, 1846, p. 378) :
22. MADAME DE VALROSE. — Je connais si bien ce genre de femmes-là. Une personne à la mode, qui leur fait quelques avances, suffit pour leur tourner la tête.
LECLERCQ, Proverbes dram., Le Bal, 1835, 1, p. 95.
S'y connaître en... :
23. Le maître d'équipage, s'étant approché, tendit la main à Yves. Jadis il avait été, lui aussi, un gabier dur à la peine; il s'y connaissait en hommes courageux et forts.
LOTI, Mon frère Yves, 1883, p. 13.
Expr. Un officier connaît ses hommes; je connais les (mes) gens; je connais (bien) le (mon) monde. Fam.! Je connais ce monde-là! je connais l' (mon) homme! que vous connaissez peu les femmes (hommes)!
3. [En relation avec la durée de l'existence humaine] Il n'a jamais connu son père (mort trop tôt).
D.— Emploi pronom. réfl. Se connaître.
1. PHILOS. [P. allus. à l'inscription frontale du temple de Delphes dont Socrate avait fait sa devise : Connais-toi toi-même] Socrate. — Se construire, se connaître soi-même, sont-ce deux actes, ou non? (VALÉRY, Eupalinos, 1923, p. 66) :
24. ... faut-il avouer que le « connais-toi toi-même » peut devenir une forme du titanisme, quand il n'est pas tempéré par une tenace patience à l'égard de ses propres ténèbres?
RICŒUR, Philos. de la volonté, 1949, p. 436.
Dans un contexte littér. Se connaître et s'accepter, ce n'est pas renoncer à l'effort, au perfectionnement : bien au contraire! (R. MARTIN DU GARD, Les Thibault, Épilogue, 1940, p. 951).
2. P. ext. Ne plus se connaître (cf. supra II E). Sortir des limites du raisonnable. Il [Spiagudry] est aussi lâche que méchant. Quand la peur le prend, il ne se connaît plus (HUGO, Han d'Islande, 1823, p. 167). Elle (Mademoiselle Sergent) ne se connaissait plus :« Tu en feras tant que je te tuerai, » qu'elle disait à Aimée (COLETTE, Claudine à Paris, 1901, p. 169).
Rem. On rencontre ds la docum. le verbe trans. con(n)obrer appartenant à la lang. arg. attesté pour la 1re fois en 1811 (Le tapis de Montron, chans. arg. ds F. VIDOCQ, Les Voleurs, p. XLX) puis chez O. Méténier : La fille : j'ai pas connobré un miché de l'an passé (La Lutte pour l'amour, 1891, p. 282). L. Daudet emploie la var. cognobrer : je le cognobre pas, ce Mézut, avec son gourbi de peinture. C'est-il un rupin ou un fauché? (Ariane, 1936, p. 21). Ce verbe est prob. issu en arg., du croisement de connaître (lat. cognoscere) avec l'esp. columbrar « voir de loin, entrevoir » (COR.); cf. var. arg. colomber (1829 ds ESN.).
Prononc. et Orth. :[], (je) connais []. -Ai-est la graph. proposée en 1675 par Berain, défendue par Voltaire mais adoptée seulement en 1835 par l'Ac. pour figurer la prononc. en [] ouvert de l'anc. diphtongue -oi- [], [] devenue [] qui se réduit à [] dans certaines classes de mots (alors que dans d'autres elle se transforme en [wa] cf. aboyer). Dès 1300 dans le peuple de Paris et régulièrement à partir du XVIe s. (cf. BOURC.-BOURC. 1967, § 54). L'a. fr. connoistre est enregistré ds Ac. 1694 et 1718; connoître avec disparition de s implosif et apparition de l'accent circonflexe ds Ac. 1740-1798; la forme mod. connaître à partir de Ac. 1835 jusqu'à 1932. Les dér. du verbe s'écrivent de même par -oi- de 1694-1798 : connoissable, connoissance, connoissement, connoisseur et par -ai- à partir de 1835. Ds la docum. on rencontre de nombreuses formes en -oi- au début du XIXe s. notamment chez les écrivains aristocrates et volontiers archaïsants tels que Chateaubriand (cf. p. ex. ds Génie du christianisme, t. 1, 1803, p. 2); mais on relève aussi chez cet aut. des formes en -ai- cf. ds René, 1802, p. 24 : je connaissois-ai- s'explique par dissimilation avec la finale). Pour des formes en -oi- cf. encore J. DE MAISTRE, Les Soirées de Saint-Pétersbourg, t. 1, 1821, p. 518 et BALZAC, Annette et le criminel, t. 3, 1824, p. 240. La prononc. [] a été traduite aussi par la graph. e comme le démontrent les vedettes connestre, connessance enregistrées à titre hist. ds Ac. Compl. 1842 et ds Lar. 19e. Noter la graph. étymol. (sur le lat. class.) cognoistre ds Ac. 1694 (en tant que vedette de renvoi à connoistre) et avec ses dér. : cognoissance, cognoissant, cognoissement ds Ac. Compl. 1842 qui note également le part. passé cognu et Lar. 19e (à titre hist.). Étymol. et Hist. A. « Savoir que quelqu'un, quelque chose existe, avoir une idée de quelqu'un, quelque chose » 1. ca 1050 conoistre en parlant d'une personne qu'on a pu voir, fréquenter (Vie de Saint Alexis, éd. C. Storey, 360); 2. ca 1170 spéc. connaître une femme (Rois 3e l., éd. E. R. Curtius, p. 110); 3. a) 1160-74 « avoir acquis des connaissances dans un domaine » (WACE, Rou, éd. H. Andresen, II, 1119); b) ca 1230 se connaître (d'une personne) (Merlin, f° 71 r° ds LITTRÉ); c) 1268 se connaître à ou en qqc. (E. BOILEAU, Livre des Métiers, éd. R. de Lespinasse et F. Bonnardot, titre LXXV, 10, p. 158); d) 1549 dr. connaître de (EST.); 4. a) ca 1175 « éprouver, ressentir » (CHR. DE TROYES, Chevalier au Lion, éd. M. Roques, 457); b) fin du XVIIe s. « avoir, être soumis à » (BOSSUET, Pensées, 33 ds LITTRÉ). B. « Reconnaître » 1. ca 1050 « reconnaître (quelqu'un ou quelque chose que l'on connaît déjà) » (Vie de Saint-Alexis, éd. C. Storey, 115); 2. a) ca 1100 « reconnaître à quelqu'un une certaine supériorité » (Roland, éd. J. Bédier, 3901); b) 1835 ne connaître que (Ac.); 3. fin du XIIe s. connaître qqc. de qqc. « distinguer quelque chose d'avec quelque chose » (Flore et Blancheflor, 496 ds T.-L.). Du lat. class. cognoscere « apprendre à connaître, connaître; reconnaître; connaître d'une affaire » et « avoir commerce charnel avec ». Fréq. abs. littér. :37 999. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 51 273, b) 45 868; XXe s. : a) 55 632, b) 59 820. Bbg. COHEN 1946, p. 34. — GOTTSCH. Redens. 1930, passim. — GOUG. Mots. t. 1. 1962, p. 284. — LERAT (P.). Le Champ ling. des verbes savoir et connaître. Cah. Lexicol. 1972, n° 20, pp. 53-63. — MELANDER (J.). Le Tour fr. « Cet homme, je le connais » St. neophilol. 1943/44, t. 16, pp. 195-200. — MÉNAGE. Connaître; — connaître de... Fr. mod. 1939, t. 7, pp. 257-258. — RAT (M.). Il n'y a pas de synon. Connaître et savoir. Vie Lang. 1966, pp. 103-107. — SAIN. Lang. par. 1920, p. 142. — STRAKA (G.). En relisant Menaud, maître-draveur. In : [Mél. Imbs (P.)]. Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1973, t. 11, n° 1, p. 283.

connaître [kɔnɛtʀ] v. tr.
CONJUG. je connais, il connaît, nous connaissons; je connaissais; je connus; que je connaisse.
ÉTYM. XIe, conoistre; du lat. cognoscere, de con- (cum intensif), et noscere ou gnoscere « apprendre ». → Gnose.
Avoir présent à l'esprit (un objet réel ou vrai, concret ou abstrait; physique ou mental); être capable de former l'idée, le concept, l'image de. || Connaître qqch. par les sens, le cœur (cit. 143 et 162), l'esprit. || Connaître l'existence d'une chose. || Connaître la nature, les caractères d'une chose.
1 (…) on peut bien connaître l'existence d'une chose, sans connaître sa nature.
Pascal, Pensées, III, 238.
2 Comme nous le connaissons rien que par comparaison, dès que tout rapport nous manque, et qu'aucune analogie ne se présente, toute lumière fuit.
Buffon, in Lafaye, Dict. des synonymes, p. 340.
3 Autre est de savoir en gros l'existence d'une chose, autre d'en connaître les particularités.
Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, III, I, I, éd. Levaillant, p. 16.
4 On peut connaître tout excepté soi-même.
Stendhal, Souvenirs d'égotisme, p. 80.
Absolt. || La difficulté de connaître. || Désir, soif de connaître. Curiosité.
5 Connaître, ce n'est point démonter, ni expliquer. C'est accéder à la vision. Mais, pour voir, il convient d'abord de participer. Cela est dur apprentissage (…)
Saint-Exupéry, Pilote de guerre, VII, p. 54.
6 Dans ce monde dévasté où l'impossibilité de connaître est démontrée, où le néant paraît la seule réalité, le désespoir sans recours, la seule attitude, il tente de retrouver le fil d'Ariane qui mène aux divins secrets.
Camus, le Mythe de Sisyphe, p. 41.
REM. Connaître et croire :
7 Connaître et connaissance désignent donc un genre dont les espèces sont constater, comprendre, percevoir, concevoir, etc. Ils s'opposent à croire et croyance, non par la force de l'adhésion, mais par le fait que ces deux derniers termes n'impliquent pas nécessairement l'idée de vérité.
Lalande, Voc. de la philosophie.
À l'infinitif substantivé. (N. m.). Didact. || Le connaître : l'activité de connaissance.
7.1 Cette grande religion du non-savoir (le bouddhisme) ne se fonde pas sur notre infirmité à comprendre. Elle atteste notre aptitude, nous élève jusqu'au point où nous découvrons la vérité sous forme d'une exclusion mutuelle de l'être et du connaître.
Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, p. 372.
———
I Connaître une chose.
1 Se faire une idée de, soit par l'expérience (→ ci-dessous, 3.), soit par des informations, de manière précise ou imprécise (mais toujours de manière pertinente). || Connaître un fait. || Connaître un mot. Savoir. || Connaître les tenants et aboutissants d'une affaire. || Connaître un aliment pour l'avoir goûté, pour avoir lu sa description. || Connaître un pays. || Connaître l'avenir. Prévoir. || Chercher à connaître qqch. Documenter (se), renseigner (se), sonder, tâter (le terrain). || C'est une chose bonne à connaître.
8 La chose quelquefois est fâcheuse à connaître (…)
Ne vaudrait-il point mieux (…)
Ignorer ce qu'il en peut être ? (…)
La faiblesse humaine est d'avoir
Des curiosités d'apprendre
Ce qu'on ne voudrait pas savoir.
Molière, Amphitryon, II, 3.
9 Il est utile à l'homme de connaître tous les lieux où l'on peut vivre, afin de choisir ensuite ceux où l'on peut vivre le plus commodément.
Rousseau, Émile, V.
10 Qui voudrait vivre, mon fils, s'il connaissait l'avenir ? (…)
Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virginie, p. 108.
11 Gilieth était le seul, dans cette troupe de recrues, à connaître la manœuvre d'un fusil et son usage dans la pratique.
P. Mac Orlan, la Bandera, IV, p. 46.
12 Car pour qu'un « historien » renverse la thèse d'un autre, il faut qu'il connaisse les faits au moins d'aussi près que lui.
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, t. IV, XI, p. 120.
Faire connaître (à qqn, une chose, une idée…). Apprendre, communiquer, dévoiler, divulguer, exposer, lancer, montrer, présenter, propager, publier, vulgariser. || La publicité fait connaître au public le produit que l'on veut lancer. || Faire connaître un sentiment à qqn. Exprimer, extérioriser, manifester, marquer, témoigner. || Faire connaître une volonté. Notifier, signifier; savoir (faire savoir).
Vx. Se rendre compte de. Apercevoir (s'), entrevoir, sentir, voir.
13 Le meunier, à ces mots, connaît son ignorance.
La Fontaine, Fables, III, 1.
Vx. || Connaître que… (mod.) Savoir (→ Capable, cit. 5).
14 (…) je connus bientôt qu'elle avait entrepris
De l'arrêter au piège où son cœur était pris.
Racine, Alexandre, I, 3.
14.1 Nous nous entretînmes de plusieurs choses jusqu'à la nuit, et je connus que le jeune homme avait beaucoup d'esprit.
A. Galland, les Mille et une Nuits, t. I, p. 162.
15 On connaît que les indigènes de la Corse ont le goût prononcé de la fainéantise.
Ch. Maurras, Anthinéa, p. 134.
2 (1160). Avoir dans l'esprit en tant qu'objet de pensée analysé. || Il connaît assez bien l'œuvre de Hugo. || Connaître un texte, un problème, une question à fond, par cœur, sur le bout des doigts. || Connaître qqch. par expérience, par intuition, pour avoir appris, étudié…
Loc. fam. Je ne connais que ça, se dit quand on n'arrive pas à se rappeler qqch. qu'on est pourtant sûr de bien savoir. (→ aussi ci-dessous).
15.1 Impossible de retrouver son nom, tout d'un coup… ah, c'est bête. Je le vois comme si j'y étais, en 1922, au théâtre Antoine… et puis son nom, pas mèche ! Enfin, je ne connais que ça…
Aragon, Blanche…, p. 70.
Loc. Ça me connaît : j'y suis habitué, je connais cela très bien.
Pouvoir faire usage de; être devenu habile en. || Connaître une méthode, son métier. || Connaître l'allemand. Savoir.
Loc. Connaître la musique. — ☑ Connaître la chanson. — ☑ Connaître qqch. comme sa poche.
Connaître (qqch.) à, en, sur qqch. || Il en connaît beaucoup, long… sur la question. — ☑ Fam. Il en connaît un bout, un rayon.
Je ne connais que ça : je connais ça très bien. || Les vins ? Mais je ne connais que ça, j'ai été caviste pendant dix ans !
(Avec la négation). || Ne pas connaître grand-chose à (un sujet). || Il ne connaît pas grand-chose à l'aviation. || Il n'y connaît rien.
REM. Savoir qui ne s'applique qu'aux choses s'emploie souvent dans le même sens que connaître (1. et 2.). Connaître s'applique à des choses concrètes et abstraites, savoir seulement à des choses abstraites. (Je sais un pays… est une exception). Il en résulte que savoir s'est spécialisé pour introduire une proposition : je sais que…, alors que la tournure connaître que est beaucoup plus rare. Dans les sciences, les arts… les deux mots s'emploient souvent indifféremment : connaître ou savoir l'allemand. Néanmoins, connaître ne signifie pas toujours comme savoir « avoir appris ». Connaître une fugue de Bach, avoir une idée de ce qu'elle est. Savoir une fugue de Bach, pouvoir l'exécuter. Seul savoir peut s'employer avec un infinitif.
(1268). Pron. || Se connaître à (qqch.).(1408, in D. D. L.). Mod. || S'y connaître : être très compétent (dans un domaine). Averti, calé, compétent, expert, ferré, qualifié, savant; entendre (s'y).
REM. Cette locution verbale, qui vient de se connaître à (qqch.) [→ ci-dessous, cit. 16, Molière], est devenue un verbe où la particule y n'est plus analysée (on peut en effet le construire avec en : s'y connaître en peinture). La langue courante l'emploie surtout absolument, par référence au contexte ou à la situation. || Il s'y connaît, celui-là ! || Tu t'y connais un peu, toi ? Tu es compétent (dans ce domaine qui vient d'être évoqué, qui nous concerne pour l'heure) ?
16 (La cour) a du sens commun pour se connaître à tout (…)
Molière, les Femmes savantes, IV, 3.
17 (…) de ces gens qui (…) parlent hardiment de toutes choses, sans s'y connaître (…)
Molière, la Critique de l'École des femmes, 5.
18 C'est bien, nous connaissons ce manège par cœur.
Loti, Mme Chrysanthème, XXIX, p. 135.
19 C'était un vieux singe qui s'y connaissait en grimace.
A. Maurois, les Discours du Dr O'Grady, V, p. 50.
19.1 Par moments, cela sent furieusement la ménagerie. Adoum, qui s'y connaît, nous montre sur une aire de sable des traces de lion, toutes fraîches; on voit que le fauve s'est couché là; ces demi-cercles ont été tracés par sa queue.
Gide, Voyage au Congo, in Souvenirs, Pl., p. 846.
19.2 (…) les confidences d'une belle, dont quelqu'un qui s'y connaît me disait (…)
F. Mauriac, Bloc-notes 1952-1957, p. 135.
19.3 (…) une petite flamme s'allumera au fond de leur œil : Tiens, tiens, c'est le fin connaisseur, le grand expert, c'est cela, ce goût fameux, mais il n'y connaît rien, ce pauvre Alain (…)
N. Sarraute, le Planétarium, p. 283.
Loc. … ou je ne m'y connais pas, se dit pour appuyer une assertion, dans un domaine où on s'estime compétent.
19.4 Vous avez vu sur sa cheminée, cette Vierge avec l'Enfant. C'est du faux Renaissance ou je ne m'y connais pas (…)
N. Sarraute, le Planétarium, p. 283.
3 (V. 1175). Avoir vécu, ressentir (qqch.). Éprouver, expérimenter. || Connaître la faim, les privations, l'humiliation.
20 Tel, lorsque abandonné d'une infidèle amante,
Pour la première fois, j'ai connu la douleur (…)
A. de Musset, Lettre à Lamartine.
21 Qui n'a connu de ces heures où l'on en arrive à ne plus se sentir vivre, tant le sentiment de la vie devient intense et accablant ?
Edmond Jaloux, la Chute d'Icare, p. 267.
22 Il avait seulement gagné d'avoir connu la peste et de s'en souvenir, d'avoir connu l'amitié et de s'en souvenir, de connaître la tendresse et de devoir un jour s'en souvenir.
Camus, la Peste, p. 313.
Connaître un lieu, y être allé. || Vous connaissez Venise ? || Jules Verne ne connaissait pas la plupart des pays qu'il a si bien dépeints.
23 Un couple, occupé de lui-même, ne connaît pas de brefs colloques.
Colette, la Naissance du jour, p. 186.
24 Ses portraits connurent des fortunes diverses, chaque modèle jugeant le sien médiocre et ceux des autres excellents.
A. Maurois, les Discours du Dr O'Grady, XVI, p. 175.
25 (…) les passions politiques atteignent aujourd'hui à un point de perfection que l'histoire n'avait pas connu.
Julien Benda, la Trahison des clercs, p. 117.
4 (1835). Ne connaître que… : tenir compte seulement de. Admettre, considérer, préoccuper (se), reconnaître. || Il ne connaît que son devoir, que la consigne. || Ne connaître que son plaisir. || Il est incorruptible et ne connaît que la justice. (Négatif). || Ne pas connaître qqch., un sentiment, ne pas en tenir compte.Il ne connaît ni Dieu ni diable : il ne croit à rien. Mécréant.
26 Ce ne sont point ici des choses où les enfants soient obligés de déférer aux pères; et l'amour ne connaît personne.
Molière, l'Avare, IV, 3.
27 Le fer ne connaîtra ni le sexe ni l'âge (…)
Racine, Esther, I, 3.
Loc. Ne plus rien connaître ( Insensible, sourd). || Dans sa fureur, il ne connaissait plus rien.
5 (1549). Trans. indir. || Connaître de : avoir compétence pour juger. || Le tribunal de commerce ne connaît pas des causes civiles.
28 Quelque bruit que fît le Nonce d'abord, de ce qu'on ne prenait pas des ecclésiastiques pour connaître d'une matière ecclésiastique (…)
Pascal, les Provinciales, XIX, in Littré.
29 Les juges de paix connaissent en matière civile, de toutes actions purement personnelles ou mobilières en dernier ressort jusqu'à la valeur de six cents francs (35 000 fr. aux termes de la loi du 24 mai 1951).
Loi du 12 juil. 1905, art. 1.
———
II Connaître une personne.
1 Être conscient de l'existence de (qqn). || Je ne connais pas cet auteur, je n'en ai jamais entendu parler. || Je le connais de nom : je connais son nom, mais guère plus.
(Le sujet désigne la société, le public). || Tout le monde le connaît, la France entière le connaît : il est connu (→ ci-dessous). || Faire connaître qqn. Lancer, produire. || Son dernier film l'a fait connaître. || Se faire connaître : se rendre notoire, célèbre, se faire une réputation. Distinguer (se). → Célébrité, cit. 4.
Loc. (1752). Ne connaître qqn ni d'Ève ni d'Adam : ne pas le connaître du tout. Déformations plais. : ni des lèvres ni des dents; ni des lèvres ni de l'Isle-Adam (San-Antonio, in Rey-Chantreau).
2 Être capable de reconnaître; savoir l'identité de. || Je connais cette tête-là. || Connaître qqn de vue, l'identifier pour l'avoir déjà vu, mais sans le connaître autrement. || Je vous connaissais de vue avant qu'on ne nous présente. || Connaître une personne pour avoir été présenté à elle, pour l'avoir rencontrée dans la rue. || Faire connaître qqn à qqn (même sens que ci-dessus I., 1.). || Se faire connaître à qqn. Présenter (se). || Ne pas se faire connaître. Incognito (garder l').
3 Avoir des relations sociales avec (qqn). Connaissance. || Chercher à connaître une personne en vue. || Faire connaître qqn (à qqn). Introduire, présenter.Pron. (récipr.). || Ils se connaissent depuis longtemps. || Nous nous sommes connus à Paris. Rencontrer.
30 Comme ils se connaissaient tous deux dès leur bas âge,
Une longue habitude en paix les maintenait (…)
La Fontaine, Fables, XII, 2.
31 Je connus feu son père en mon voyage à Rome.
Molière, les Femmes savantes, II, 2.
32 Donc, vous n'étiez pas un familier de la maison ? Les voisins n'avaient pas pu vous remarquer ? Ils ne vous connaissaient pas de vue ?
J. Romains, les Hommes de bonne volonté, II, IV, p. 39.
4 Se faire une idée de la personnalité de (qqn). Apprécier, comprendre, juger. || C'est une personne que je connais assez bien. || Connaître les hommes et les juger. || Se faire connaître et se faire apprécier. || Se laisser connaître. Découvrir (→ ci-dessous, cit. 40).
Pron. || Se connaître : être capable de se juger (→ ci-dessous, cit. 35, 39, et 42). || Il se connaît mal. || Connais-toi toi-même. Gnôthi se auton (maxime de Socrate).Vx. || Elle se connaît menteuse : elle sait qu'elle est menteuse (→ ci-dessous, cit. 36).
33 Mes pareils à deux fois ne se font point connaître,
Et pour leurs coups d'essai veulent des coups de maître.
Corneille, le Cid, II, 2.
34 (…) vous ne me connaissez pas encore. Vous me faites grand tort de juger de moi par les autres (…)
Molière, Dom Juan, II, 2.
35 Il faut se connaître soi-même : quand cela ne servirait pas à trouver le vrai cela au moins sert à régler sa vie, et il n'y a rien de plus juste.
Pascal, Pensées, II, 66.
36 La grandeur de l'homme est grande en ce qu'il se connaît misérable. Un arbre ne se connaît pas misérable.
C'est donc être misérable que de (se) connaître misérable; mais c'est être grand que de connaître qu'on est misérable.
Pascal, Pensées, VI, 397.
37 Pour connaître les hommes, il faut les voir agir.
Rousseau, Émile, IV.
38 (…) on connaîtrait mal par rapport à soi les autres hommes, si on ne se connaissait pas bien soi-même.
É. de Senancour, De l'amour, p. 184.
39 L'homme est un apprenti, la douleur est son maître,
Et nul ne se connaît tant qu'il n'a pas souffert.
A. de Musset, Poésies nouvelles, « Nuit d'octobre. »
40 (…) ne vous laissez jamais connaître entièrement, vous qui voulez être toujours aimés de celles qui vous aiment.
Barbey d'Aurevilly, Une histoire sans nom, p. 102.
41 Au reste, il n'y a d'intéressant à connaître que les saints, les scélérats et les fous; ce sont les seuls dont la conversation puisse valoir.
Huysmans, Là-bas, XV, p. 206.
42 (…) qu'il y a dans l'analyse un principe de mort, et que l'homme se connaît d'autant moins qu'il se regarde davantage.
J. Paulhan, Entretien sur des faits divers, III, p. 85.
Loc. Ne plus se connaître : ne plus se maîtriser; être exalté ou en colère. Emporter (s').
42.1 Il n'est pas ivre, c'est un artiste, affirma-t-elle. En Italie, quand un maestro fait de la grande musique, il ne se connaît plus.
Francis Carco, les Belles Manières, p. 24.
5 (V. 1170). Style biblique. || Connaître une femme, avoir avec elle des relations charnelles. Posséder, prendre (→ Autre, cit. 15).
43 Adam connut Ève, sa femme; elle conçut et enfanta Caïn (…)
Bible (Crampon), Genèse, IV, 1.
44 Il est plaisant que le mot connaître une femme veuille dire : coucher avec une femme… comme si on ne connaissait pas une femme sans cela.
Chamfort, Maximes, « Sur les femmes et le mariage », VII.
———
III (V. 1050). Vx. Trouver en (qqch., qqn) ce qu'on connaissait déjà. Reconnaître. || C'est au fruit que l'on connaît l'arbre (cit. 41). || À l'œuvre on connaît l'artisan (La Fontaine, I, 21).
45 — L'amour. — Ce mot est beau. Dites-moi quelques marques
À quoi je le pourrai connaître : Que sent-on ?
La Fontaine, Fables, VIII, 13.
46 (…) qui t'aurait connu déguisé de la sorte ?
Racine, les Plaideurs, II, 2.
(Fin XIIe). Discerner, distinguer. || Connaître sa main droite de sa main gauche. || Connaître le bien et le mal.
47 (…) À connaître un pourpoint d'avec un haut de chausse.
Molière, les Femmes savantes, II, 7.
——————
connu, ue p. p. adj.
ÉTYM. (XIIIe).
A (Choses).
1 Qui existe en tant qu'objet de pensée, n'est pas inconnu. Découvert, présenté, révélé (→ Christianisme, cit. 5). || Secret qui commence à être connu. Transpirer. || Cette nouvelle déjà connue (publiée) a reçu confirmation ( Officiel). || Le monde connu.N. m. || Le connu et l'inconnu.
2 Que la majorité connaît, sait. Répandu. || Chose, idée très connue. Notoire, proverbial; public; commun, rebattu, réchauffé; courir (qui court les rues). || C'est bien connu. Évident. || Chose connue sous le nom de… (→ Alliance, cit. 6).
48 (…) Messieurs, mon mérite et ma gloire
Sont connus en bon lieu (…)
La Fontaine, Fables, IX, 3.
L'anglais est une langue connue dans de nombreux pays. Su.
49 Il reste encore la volonté immuable de connaître, ce plaisir du savoir désintéressé, que nous devons à l'ignorance, car ce qui est connu est bientôt insipide.
J. Chardonne, l'Amour du prochain, VIII, p. 213.
B (Personnes). Qui a une grande réputation. Célèbre (→ Attendre, cit. 117). || C'est un homme connu et influent. — ☑ Loc. Être connu comme le loup blanc, le loup gris : être très connu. || Un homme connu dans les milieux littéraires. || Être connu comme… en tant que… || Il est connu en tant que conférencier, n'est connu que pour tel.Ni vu ni connu, sans que cela ne se sache, sans qu'on ne le remarque. Incognito.
50 Oui, je sais. Tous les grands hommes furent d'abord méconnus; mais je ne suis pas un grand homme, et j'aimerais autant être connu tout de suite.
J. Renard, Journal, 28 avr. 1893.
CONTR. Douter, ignorer, méconnaître, renier. — Dédaigner, négliger. — (Du p. p.) Inconnu, inédit, obscur, oublié.
DÉR. Connaissable, connaissance, connaissant, connaissement, connaisseur.
COMP. Méconnaître, reconnaître. — Archiconnu, inconnu.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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